03/03/2014

LQR, Twitter, FN... on a perdu

Dire "Khadafi est un terroriste", ça prend 4 secondes, et ces 4 secondes suffisent, car tout le travail de démonstration (que ce soit vrai ou faux) a été fait en amont pendant des années.
Mais dire "Le patron de la CIA est le pire des terroristes", ça ne peut pas se dire en 4 secondes, car on va à l'encontre du message généralement diffusé ! C'est une idée nouvelle que vous aurez intérêt à être capable d'étayer"
Naom Chomsky


C'est la raison pour laquelle il est difficile de faire admettre beaucoup de choses qui sont des évidences pour qui sort un peu des sentiers battus et rebattus par les média dominants ! Ainsi, le simple fait de critiquer le capitalisme sera tâche impossible !
"Ah oui, et tu mettras quoi à la place ?"
"le communisme on a déjà essayé"[1]

Rien ne nous sera épargné, rien ne nous sera offert ou concédé. Car comme l'a montré Bourdieu, les média sont le porte-voix d'un status-quo du système et de l'organisation d'une société bâtie de telle façon qu'ils en sont et les modeleurs et ceux qui en profitent. C'est à dire que les voix discordantes sont marginalisées, tues, et étouffées (ou récupérées).

Aussi, quand nous disons, à titre d'exemple, que le FN est toujours l'incarnation de ce que le capitalisme ("à papa" ou financier) peut produire de plus abject pour défendre ses intérêts, nos mots tombent à plat. Ils entrent en "conflit cognitif" avec l'idée de "dé-diabolisation" si solidement ancrée et qui nous a été (et est) serinée depuis l'accession de la salope aux manettes de ce .. parti. En effet, même nous, les adversaires de cette coterie familiale haineuse spécialisée dans le rejet de l'autre et la création de bouc émissaire, commettons l'erreur de valider l'expression en ceci que nous la relayons, l'utilisons (même pour en combattre l'idée) et conséquemment, la banalisons.

Or, il s'agit d'un mot simple mais peu usuel, à forte valeur symbolique et émotionnelle, hors même de son contexte. Il agit, du coup,  non plus en tant que partie de notre tentative de déconstruction de cette opération de banalisation, mais il existe "en soi" en tant qu'il est devenu une qualification automatique du nom du parti. Ils vont ensemble, ils sont consubstantiels. FN, dédiabolisé.

Par cette énième supercherie sémantique de la LQR imposée par nos média, les deux termes sont désormais associés. FN dé-diabolisé.

Un parti, et la négation de la négativité qu'il sous-tendait, qu'il portait en lui. Nous (en tant que complices de la vulgate dominante, en reprenant ses concepts et ses termes) avons abattu les murailles honteuses qui susistaient encore autour de ce groupuscule nazifiant.
Voilà, quoi !

Encore une fois nous nous sommes laissés entraîner vers un terrain que nous ne maîtrisons malheureusement plus : celui des mots.

Il est plus qu'urgent de reprendre nos mots, ceux qu'on taxe trop facilement d'archaïsme, mais qui sont les nôtres ! Et qu'on ne traite d'archaïques que parce que nous avons cessé de les défendre.

C'est une des raisons pour lesquelles Twitter n'est pas notre terrain de lutte. C'est une des raisons pour lesquelles nous partons toujours avec un métro de retard. Nous avons participé à l'évidence du FN. Et maintenant plus qu'avant, là où 140 caractères suffisent à dire sa connerie et sa haine d'une façon que tout le monde comprendra, un chapitre entier nous sera nécessaire pour expliquer qu'en 2014 on puisse encore être porteur de la belle idée communiste.


Notes
[1] 980 mille milliards de morts, (et encore, juste chez tonton Kim Jong Un, et pour la seule semaine dernière)